Un projet CRM est souvent porteur de beaucoup d'espoirs lorsqu'il est réfléchi et décidé, mais malheureusement aussi, souvent porteur de déceptions lorsqu'il est exécuté. Qu'est-ce qui se passe entre l'intention de départ et la réalisation à l'arrivée ?

Un projet CRM bien mené et réussi peut concrètement contribuer à l'amélioration de la performance économique et commerciale de l'entreprise.

Il aidera à structurer ses contacts  et à organiser son activité de manière plus efficace autour de ses interactions avec ses clients et prospects.

Les logiciels de CRM (Customer Relationship Management) opérationnels modernes sont assez élaborés et intègrent des fonctionnalités poussées de gestion de la relation client qui leur permettent de tenir compte de la complexité de l'écosystème de l'entreprise, et qui apportent des possibilités très avancées de structuration et d'optimisation de la relation client.

Sur papier, ces solutions peuvent réellement changer la manière de fonctionner de l'entreprise et lui permettre de réaliser un step change notable dans sa manière de gérer sa relation quotidienne avec ses clients et sa performance commerciale, mais dans beaucoup de cas, leur mise en œuvre est plus souvent génératrice de frustrations et d'insatisfactions que d'accomplissements et de réussite.

On estime à plus de 60% le taux d'échec des projets CRM aujourd'hui (Etude Gartner) !

Qu'est-ce qui peut expliquer ce niveau d'échec ?

Globalement, ce type de projet peut réussir ou échouer à partir de 4 familles de raisons pour faire simple :

  1. Des raisons liées aux outils, produits et technologies utilisées
  2. Des raisons liées à l'organisation et à la culture de l'entreprise
  3. Des raisons liées au facteur humain 
  4. Des raisons liées à la démarche de choix, d'implémentation et de conduite de changement

Prenons les un à un pour mieux les comprendre.

#1 Facteurs liés aux produits et aux solutions CRM elles mêmes :

La première famille de facteurs a expliqué pendant longtemps l'échec de projets CRM dans les entreprises, mais en 2021, il est difficile de continuer à imputer l'aboutissement de ce type de projets aux solutions technologiques, à leurs fonctionnalités ou à leur ergonomie.

Les technologies actuelles de CRM ont énormément évolué  sur le plan fonctionnel et technique, elles se sont également beaucoup simplifiées sur le plan ergonomique pour faciliter leur appropriation par tous les publics, se rapprochant des univers habituels d'interfaces auxquels sont exposés les utilisateurs dans leur quotidien, notamment les réseaux sociaux.

Les technologies CRM de nouvelle génération ont gagné en sophistication et en granularité fonctionnelle, et ont réussi pour beaucoup, le pari de la simplification des interfaces utilisateurs, de l'intuitivité et de prise en main en mode quasi autonome.

Elles sont paradoxalement devenues plus complexes sur le plan fonctionnel pour cadrer avec l'évolution de l'environnement digitalisé de l'entreprise, mais ont réussi à négocier ce tournant en simplifiant la prise en main et l'usage.

Elles ne peuvent plus réellement être blâmées et expliquer l'échec de ce type de projets, sauf dans les cas de mauvais choix, parce qu'il reste sur le marché beaucoup de technologies d'ancienne génération qui n'ont pas évolué, et cela relève plutôt de la quatrième famille de facteurs explicatifs que de la première.

Pour minimiser ou éviter ce facteur de risque, nous vous conseillons de :

  1. Choisir une technologie de dernière génération pour bénéficier des architectures ouvertes et interopérables 
  2. Privilégier une plateforme intégrée qui couvre l'ensemble des processus du front office à savoir, le marketing, la vente et le service client et qui est construite autour d'un référentiel unique de contact ou de client
  3. Choisir une plateforme capable d'intégrer les nouvelles solutions de marketing conversationnel et d'intelligence artificielle qui vont progressivement transformer l'approche relationnelle à l'avenir
  4. Choisir une solution logicielle CRM paramétrable qui demande un minimum d'intervention technique et qui peut être maintenue et suivie par une équipe du métier sans dépendance par rapport à l'IT.
  5. Choisir une plateforme totalement adaptée à l'approche social selling qui devient progressivement l'approche principale de développement commerciale dans les entreprises

#2 Facteurs liés à l'organisation et à la culture de l'entreprise :

Un projet CRM peut par moment être un projet "fuite en avant" dans certaines organisations. 

Il arrive que certaines entreprises manquent sérieusement de culture commerciale structurée et d'approche "industrielle" de la vente, avec tout ce que cela suppose comme compétences internes et comme philosophie d'approche client.

Or, un projet CRM est par essence un projet visant à structurer et à optimiser l'effort de gestion de toute la relation client certes, mais d'abord de la relation commerciale qui est au centre des fonctionnalités de ce type de technologies.

Quand l'organisation manque de process intégrés dans les usages quotidiens des équipes, le CRM ne peut être d'un grand apport, puisqu'il n'a pour vocation que d'accompagner cette structuration et d'apporter des éléments d'amélioration de productivité et de traçabilité de l'effort relationnel avec les clients et prospects.

Un projet CRM peut effectivement être un projet prétexte pour structurer l'approche relationnelle de l'entreprise, mais il faut dans ce cas  situer correctement l'attente vis-à-vis de la technologie et bien pondérer les autres projets annexes à ouvrir pour réussir le chantier CRM de l'entreprise : 

  • Remise à plat des process, décomposition de l’activité commerciale et des responsabilités dans la chaîne de traitement
  • Revue critique des systèmes d'informations en interface avec le CRM, 
  • Revue critique des systèmes de mesure de la performance et de rétribution des équipes du front office, 
  • Revue par moment totale de l'organisation pour regrouper certains blocs fonctionnels et les aligner avec la chaîne de valeur client
  • Réflexion approfondie sur les données clients existantes et à capter à court et à long terme
  • Revue des compétences internes et mise à niveau etc.
  • Etc...

Une entreprise fondamentalement "non collaborative", construite autour de sillons forts, et de verticaux fonctionnels rigides, n'a rien à tirer de positif d'un projet CRM, quelque soit la technologie utilisée et quelque soit le talent de l'équipe qui le mettra en place : la greffe ne prendra simplement pas !

Un projet CRM oblige à la collaboration autour d'un référentiel client ou contact, dans l'ouverture, le partage d'information, la transparence et la responsabilité mesurée et identifiable à toute l'équipe.

Pour minimiser ou éviter ce facteur de risque, nous vous conseillons de :

  1. Définir avec autant de clarté possible vos processus de marketing, de vente et de service après vente (ce qu'on pense faire) et les confronter avec votre réalité quotidienne (ce qu'on fait réellement) et vos analyses de votre environnement (ce qui bouge à l'extérieur) pour voir où sont les gap à combler et les risques à anticiper
  2. Auditer votre culture de la collaboration et mettre le doigt sur les risques de rejet du CRM inhérents à la logique de partage de l'information et son impact sur la répartition des pouvoirs dans la chaîne de traitement 
  3. Valider que le projet CRM sera un projet transverse dans l'organisation, porté activement par le top management avec un engagement de suivi rapproché, et non un projet de fonction ou de pôle avant d'avancer
  4. Écrire de manière précise vos objectifs et vos enjeux stratégiques et opérationnels, les partager, en discuter, et engager l'équipe projet sur cette base avant toute démarche de réflexion sur les outils ou les technologies à choisir.

#3 Facteurs liés à l'humain :

Comme dans tout projet d'amélioration ou de transformation, le facteur humain est le plus décisif dans la réussite ou l'échec d'un projet CRM.

Un projet CRM peut naturellement générer chez des membres de l'équipe des croyances et des sentiments du type :

  • Flicage : on suivra à la trace ce que je fais, je deviens "nu" dans l'organisation
  • Perte de pouvoir : en donnant toute l'information, je n'ai pas d'élément fort de négociation, on pourrait se passer de moi facilement
  • Sentiment d'iniquité : je leur permet d'améliorer la connaissance et le renforcement de leurs fonds de commerce, je ne suis pas assez rétribué pour cela
  • Revenus en péril : on ne peut plus raconter de bobards, quand on est pas efficace, ça se sait et ça se mesure, et il ne suffit pas de savoir "gérer" son boss pour être considéré, promu et rétribué
  • Fainéantise et investissement minimal révélés : j'en fais le minimum depuis toujours ou depuis longtemps et ça ne se voyait pas, là c'est différent, on va me percer à jour !
  • Résistance naturelle au changement : on va me sortir de ma zone de confort, je ne suis pas sûr d'être à la hauteur, je vois des risques, mais pas de bénéfices
  • Etc….

La meilleure manière de planter son projet CRM est de faire abstraction de ces sentiments et croyances et de considérer qu'ils vont s'estomper naturellement avec le temps et l'autorité du chef.

Ces sentiments et croyances sont naturellement humains, nous les avons tous à des degrés différents et à des moments de nos vies, ils sont légitime, voire salvateurs dans une organisation vivante où les individus se projettent et se battent pour garder leur place ou pour évoluer.

Les éditeurs de technologies rivalisent d'ingéniosité pour démontrer les bénéfices pour les utilisateurs à travers pleins de fonctionnalités de confort et de productivité, mais la réalité profonde d'un projet CRM, c'est qu'il bénéficie avant tout et en large majorité à l'entreprise, aux dirigeants et aux actionnaires !

Pour réussir son projet, il faut tenir compte de ces sentiments et croyances, et en faire des éléments de réussite plutôt que des facteurs de résistance et d'échec, et pour cela nous vous conseillons :

  1. D'en parler ouvertement avec vos collaborateurs : vous respecterez leur intelligence, leur accorderez une forme de considération qui rejaillira positivement sur leur ouverture au changement que vous leur proposez, ou à minima, vous comprendrez très tôt qui sera dedans et qui ne le sera pas !
  2. Vous préparer à revoir vos systèmes de rétribution : un CRM permet de construire des systèmes au mérite, et il n'y a que de cette manière que vous pourrez engager le plus grand nombre autour de vous
  3. Apporter une grande attention à la conduite du changement et prendre votre part de responsabilité à ce sujet : prévoir les formations adaptées, des espaces d'accompagnement individualisés via des tiers non impliqués dans le quotidien, consultants ou coachs, et maintenir un fils de communication dense et régulier pendant les premiers moments de vie du projet
  4. Valoriser les avancements, mêmes les plus minimes, encourager les initiatives qui montrent des efforts d'appropriation même lorsqu'elles sont basiques, et créer les conditions de confiance pour favoriser l'ouverture
  5. Accepter que certains ne se retrouveront jamais dans ce nouveau schéma de fonctionnement et préparer leur départ ou leur reconversion, dans le respect des bonnes pratiques de gestion des ressources. 

#4 Facteurs liés à la démarche de choix et de mise en œuvre : 

Dernière famille de facteurs, la plus visible probablement lorsqu'une entreprise cherche à se doter d'un CRM ou à en changer.

La première question dont la réponse influera significativement sur la trajectoire du projet est la suivante : qui pour piloter le choix et la mise en place dans l'entreprise ?

Confier le projet à l'IT, à un directeur métier ou fonctionnel, à une équipe projet hybride, ou directement au top manager aura un impact sur les angles qui seront privilégiés et la lecture globale du projet qui sera faite et qui conditionnera la mise en œuvre.

Le choix doit être simplement cohérent avec l'organisation, il n'y a pas réellement de choix meilleur que d'autre, mais quelques principes à respecter pour minimiser les angles morts et les orientations préjudiciables :

  • L'IT manager a un rôle certain et décisif dans ce type de projet, il doit être une ressource au service de la démarche et de l'équipe et non le moteur principal : son cadre de référence naturel n'est pas le bon pour piloter ce profil de projet, il aurait tendance à minimiser les facteurs psychologiques et humains, et chercherait naturellement à créer la machine parfaite...mais complexe et inutilisable.
  •  Un directeur fonctionnel ou métier : il a l'avantage d'être au contact du terrain et des particularités de la relation client en amont et en aval, s'il a une très forte culture IT et technologique, il serait bienvenu pour piloter le cadrage de ce type de projet, mais il est rare que ce soit le cas, il connaît le métier généralement, mais comprend en réalité peu de chose à la technologie
  • Le grand boss : ça peut sembler une bonne idée, il a l'autorité et c'est essentiel dans ce type de projets, la capacité de poser des objectifs stratégiques et de mettre le doigt sur les enjeux, mais il aurait naturellement tendance à voir le projet sous le prisme des indicateurs, du reporting, des tableaux de bords, soit l'aboutissement final attendu, sans avoir forcément la patience d'accepter et de comprendre tout le cheminement opérationnel détaillé à réussir, et avec le risque de banaliser les facteurs psychologiques inhérents aux humains.

En réalité, ce type de projets est transversal, complexe, multidimensionnel et collaboratif, et pour le réussir, rien ne remplace l'intelligence collective placée sous une autorité ayant la légitimité de trancher et d'arbitrer.

Cette première question évoquée et expliquée, il s'agit de régler la seconde qui est très souvent négligée ou traitée avec légèreté : le cadrage détaillé du projet

S'il y a une chose à réussir, c'est bien le cadrage d'un projet CRM ! 

Un cadrage correctement fait doit se solder par une note formelle de cadrage qui servira de base à la rédaction des termes de référence pour lancer une consultation ou une demande de manifestation d'intérêt, une demande de prototypage ou le choix direct d'une solution et d'un intégrateur.

Le travail sur le cadrage est un moment essentiel pour se poser les bonnes questions, valider les enjeux stratégiques et opérationnels du projet, identifier le chemin critique pour le réussir, anticiper les entraves potentielles, fixer les must have et les priorités, lotir le projet dans le temps et arbitrer entre plusieurs dimensions par moment antagonistes.

Il doit idéalement être confié à un expert externe, qui comprend à la fois les enjeux métiers de la relation client et de la performance commerciale, et les enjeux techniques et opérationnels du CRM.

Sa neutralité est un gage d'efficacité, il n'a pas d'enjeu de pouvoirs dans l'organisation, aucune raison d'orienter le projet dans un autre sens que celui de la recherche d'efficacité, de productivité et d'amélioration de l'expérience client, et une relation par principe équidistante avec toutes les parties prenantes pour poser les bonnes questions et créer les bons débats à l'intérieur de l'équipe projet pour affiner les projections et les besoins avant de lancer le choix et la mise en œuvre.

Cette phase est critique, de sa profondeur et de la rigueur qu'on y mettra, dépendront les chances de succès du projet, car un projet bien conçu est déjà à moitié réussi.

Le cadrage n'empêche pas de faire appel à des éditeurs pour présenter leurs solutions dans le cadre d'ateliers ouverts à toute l'équipe projet, bien au contraire, plus on découvre le fonctionnel disponible sur certaines plateformes, plus on affine les besoins et plus on valide l'orientation à donner au projet.

Pour minimiser ou éviter ce facteur de risque, nous vous conseillons de :

  1. Vous faire accompagner par un consultant expert dans cette phase pour être sûr de couvrir tous les angles et pour formaliser correctement vos besoins
  2. Ne pas hésiter à prendre le temps de découvrir des plateformes à travers des ateliers avec les éditeurs ou leurs intégrateurs, pour intégrer les connaissances fonctionnelles et techniques apprises dans les raisonnements de choix et de lotissement du projet
  3. Ne pas hésiter à écrire une note de cadrage, parce que l'écrit nous oblige à structurer nos idées, à les partager, à les challenger et à nous assurer d'avoir la même lecture et compréhension des enjeux et du déroulé du projet avec l'équipe qui sera mobilisée dessus
  4. Bien réfléchir à l'équipe projet et éviter de confier la direction de celui-ci à toute personne dont le rôle ou la fonction pourrait réduire le projet CRM à une seule dimension opérationnelle ou technique, là où c'est un projet transversal et collaboratif
  5. Avoir le sponsoring formel et dans les faits du grand boss pour bénéficier de l'autorité requise pour donner la bonne dynamique au projet

Ces quatre familles de facteurs sont présentes de manière différente selon la taille de l'organisation, sa culture managériale dominante, la nature de son activité, les profils de ses compétences etc. 

Certains facteurs sont plus présents dans certaines organisations que dans d'autres, mais ils sont forcément là à tous les moments du cycle de vie d'un projet CRM et il faut en tenir compte.

Les entreprises qui réussissent leurs projets en tiennent compte totalement ou partiellement, mais elles ont pour point commun d'être toutes attentives aux éléments critiques de chaque famille et de ne pas les négliger.

Nouveau call-to-action

Nabil HAFFAD
Nabil HAFFAD

Passionné de marketing digital depuis plus de 24 ans, fondateur et associé de l'agence, expert en transformation digital, Executive coach et mentor, fondateur et associé d'une société spécialisée en Intelligence Artificielle et en Data Science, et fondateur et associé d'une start-up spécialisée en E-Santé. Je co-dirige les différentes missions de l'agence et assure l'interface relationnelle avec les décideurs chez nos clients.